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LE MATCH DES ÉCOLES

 

En fonction de ses projets sportifs, on hésite parfois à choisir sa voie scolaire ; la filière qui fait rêver présente souvent plus de difficultés que d'avantages à la navigation assidue, à l'absentéisme pour raison de stages ou de compétitions, à la réussite des examens.

Certains d'entre vous ont accepté de témoigner, pour raconter leurs expériences à ceux qui se poseraient encore quelques questions.

Propos recueillis et mis en page par Manon B.

 

Audrey Charbonnet explique la section sport-étude au Lycée de La Rochelle

"Le programme des sport-études est bien chargé : en navigation (mercredi, vendredi, samedi et dimanche) et en préparation physique (avec 1h30 de musculation le mardi et 1h de footing le jeudi). Cela reste, sans compter les heures de cours auxquelles il faut assister, la première règle du sport-étude étant de n'admettre (sauf exceptions) aucun redoublement !

A La Rochelle, je vis en internat, ce qui n'est pas toujours évident, voire franchement "chiant" parfois. Pour les quelques privilèges dont nous bénéficions, et parce qu'il faut bien reconnaître que les voileux avons de grandes gueules, les autres élèves ne nous apprécient que moyennement Heureusement, les pions et les CPE sont plus indulgents avec nous, car ils se rendent bien compte de la difficulté de vivre loin de nos familles respectives.

Au fait de privilèges - si on peut parler de privilèges - notre vendredi après-midi est libéré pour nous permettre de naviguer. Il faut reconnaître que c'est un sacré plus, et que nos autres camarades de classe sont bien contents d'en profiter ! Chaque classe a droit à deux heures hebdomadaires de soutien ­ et si on se retrouve seul sport-étude dans une classe, qui ne rêve pas de ce tête-à-tête avec le prof ?! Les internes mangent en tant que prioritaires à midi et ont le droit de rentrer à 19h (au lieu de 18h30), le mercredi et le vendredi, ce qui change la vie !

Mais pour moi, ces conditions ne sont que des détails face au fait de pouvoir naviguer deux à quatre fois par semaine, de travailler avec des entraîneurs qui nous aident aussi bien sur l'eau, qu'en préparation physique à terre. Le sport-étude est véritablement une expérience en or, où règne une ambiance géniale, et qui permet de progresser énormément en voile ! Croyez-moi, je sais de quoi je parle !"

Marion Deplanque raconte sa prépa HEC, filière économique, au Lycée Saint-Charles de Marseille

"Comme tout le monde s'en doutera, la prépa n'est pas l'idéal pour conjuguer études et passion. Mais c'est malgré tout dans le domaine du possible, si cela ne vous gène pas de ne pas sortir trop souvent, de ne pas dormir beaucoup, et de péter les plombs de temps en temps.

J'ai effectué ma prépa à Marseille pour justement essayer de conjuguer prépa et voile, et la plus grande difficulté que j'ai rencontrée est celle que me posaient les profs. Allez leur expliquer qu'il faut m'excuser pendant trois semaines hors période de vacances, pour cause de régate en Italie, en Allemagne ou ailleurs !! Ainsi, pour passer le cap du passage en 2ème année, il faut savoir user de diplomatie, mentir, juste un petit peu ("Vous savez, moi, la voile, c'est fini pour un an !") et malgré tout, ralentir le rythme voile.

Une recette pour ne pas y rester : être très organisé, travailler la semaine pour libérer les week-end, démontrer aux profs que la voile, et le sport en général, n'est pas un frein dans les études, mais au contraire un atout pour la vie future, et une petite sortie de temps en temps pour casser le train-train, voile/prépa, voile/prépa.

Bien sûr, si vous choisissez d'aller en prépa, ce n'est pas la manière la plus facile de continuer la voile ; mais en se donnant un peu de moyens, c'est à peu près réalisable, du moins, de ne pas décrocher totalement pendant deux ans."

 

Romain David présente l'INSA

"Cette année, c'est ma troisième à L'I.N.S.A. de Lyon. Implantée dans d'autres villes françaises, le niveau de cette école d'ingénieur est reconnu, puisqu'elle est classée dans les dix meilleures ; mais ce qui la rend exceptionnelle, c'est manifestement les moyens qu'elle a développés pour les sportifs, à conditions qu'ils soient reconnus par les listes ministérielles. L'école propose une formation en cinq ans. Le cycle préparatoire dure deux ans, réalisables en trois pour les sportifs HN. Le second, qui correspond à une spécialisation en différents départements peut aussi être aménager en quatre années au lieu de trois.

Le recrutement se fait majoritairement sur dossier (mention bien minimum pour le cycle normal, assez bien et résultats sportifs pour la section sport-étude) ; en fin de première année, 20 à 25% des élèves sont non-admissibles, et en fin de seconde, encore 5%, après quoi, la sélection pour les passages en années supérieures est moins rude.

L'école de Lyon propose un fonctionnement original pour le cycle préparatoire : les sportifs HN sont regroupés dans une même classe (dans les autres écoles, ce n'est pas le cas). Les possibilités sont alors très larges, car les classes sont totalement autonomes et réfléchissent à leur planning de partiels avec leurs professeurs. A partir de la division en départements, le fonctionnement est beaucoup plus individuel (c'est le cas dès le cycle préparatoire des autres INSA).

Un tuteur, prof de sport, qui est nommé à l'année, est chargé d'établir les relations entre les élèves sportifs et leurs professeurs, d'éventuellement se charger des programmes de préparation physique et de la mise en place de cours particuliers (financés par le système, si certains élèves ont en besoin, après des absences.)

Les absences sont facilement acceptées, après arrangement avec le chef de département, et la semaine de cours est très bien programmée pour les voileux : elle commence le lundi et se termine le jeudi à midi ! Et nous sommes libérés tous les jours à 16h, sachant que pendant les cours, le fonctionnement reste très scolaire. Nous sommes vingt par classe, comme au lycée, avec des professeurs forcément très accessibles ; en cycle normal, ils sont plus nombreux et suivent aussi des cours en amphis.

L'INSA présente aussi l'avantage d'offrir le logement sur place et de nombreuses infrastructures, c'est un véritable campus ; et nous, nous avons accès à une salle de muscu.

Notre diplôme est reconnu et suffisamment généraliste pour ne nous fermer aucune porte. Cette école est un top, d'autant que les chefs d'entreprises pensent souvent que la pratique d'un sport nous a enrichis. Son seul inconvénient serait que jusqu'à présent, Lyon était un peu éloigné des pôles, mais avec le TGV"

 

Sophie De Turckheim en fac de STAPS

"Je suis rentrée cette année, en première année de DEUG à Nice, avec option voile, parce que plus tard, je voudrais faire l'IUFM ; et pour accéder à ce concours, j'ai besoin d'une licence de n'importe quoi. J'ai choisi la fac de sport parce que c'est ce qui, pour moi, me semblait le mieux adapté. La fac de lettres, je n'y aurais jamais pensé !

Plus sérieusement, j'y trouve aussi beaucoup d'avantages. D'abord, le sport fait partie intégrante du programme d'étude, des activités comme la piscine me permettent de travailler ma condition physique ; je reste toujours dans le monde du sport, c'est ce qui me plaît. Et puis, avec un petit volume horaire de cours (environ 25 heures hebdomadaires, en comptant les cours magistraux et les travaux dirigés), il me reste du temps pour naviguer.

Grâce aux listes ministérielles de Haut Niveau (ou grâce à la notion d'investissement reconnu par la fac, pour des sportifs comme les footeux, dont l'accès aux listes haut-niveau est très exceptionnel), je bénéficie d'un statut particulier. Avec des justificatifs, je peux m'absenter pour des stages ou des régates. Mais ce n'est pas toujours évident si les cours magistraux ne sont pas obligatoires, ce n'est pas le cas des travaux dirigés, et certains profs ne se soucient pas du statut haut-niveau de certains de leurs élèves, et si ceux-ci sont absents, ils n'ont alors aucun recours.

A Marseille, il y a une possibilité de passer ses examens en septembre, en première session, et d'avoir accès, en cas d'échec, à une session exceptionnelle d'octobre. Je ne sais pas si cela fonctionne sur Nice, mais Stéphane Christidis, qui naviguait aux Jeux Med en 470 pendant les examens, a du attendre que le DTN descende de Paris pour arrondir lui-même les angles avec l'administration, pour qu'il passe en seconde année !

Des avantages, il y en a ; mais je ne pousserais personne à faire STAPS, rien que pour avoir du temps pour naviguer à côté : il y a plein d'autres voies qui donnent des avantages aux sportifs."

   

Anne Marteau, de dentaire

"C'est la galère, point. Pour réussir sa première année de médecine, il n'y a pas d'autres choix que celui de travailler douze heures par jour, du 1er septembre à la fin des partiels, et ce n'est pas une simple façon de parler. Le concours qui clôt la propédeutique est sans appel, c'est une sélection de 9%. Jusqu'en décembre, j'ai réussi à naviguer une fois par semaine, j'arrivais au port et mon frère avait déjà préparé mon bateau. Mais dès le second semestre, c'est devenu totalement impossible. A part deux ou trois navigation en dart, je n'ai plus mis le pied sur un bateau. Je n'avais plus ni le temps, ni les sensations pour l'europe.

Ma réussite en première année est exceptionnelle ; la motivation qu'il m'a fallu et le travail que j'ai fourni sont indescriptibles. Après, j'ai du faire le choix difficile entre médecine et dentaire. En médecine, avec la question des stages en clinique et du reste, c'est impossible de faire quoique ce soit à côté.

J'ai choisi dentaire, pour d'autres raisons aussi, mais parce que l'emploi du temps s'allégeait. Maintenant, les choses sont tranquilles pour moi. Je finis ma semaine le mercredi soir, car j'ai regroupé tous mes travaux dirigés sur ces trois jours, et il me reste du temps pour courir ou des choses comme ça. Ensuite, je peux aller naviguer sur La Rochelle. Avec ça, j'ai un statut sportif de haut-niveau, et je peux m'absenter comme je veux

Mais avant d'en arriver là, il faut s'accrocher !!!"

 

Manon Borsi amuse tout le monde en lettres

"Il y a trois ans, j'ai fait le choix d'entrer en fac de lettes modernes. Cela correspondait certes à mon projet professionnel de présenter, après le DEUG ou la licence, les concours d'entrée en écoles de journalisme ; mais aussi (et peut-être surtout), parce que j'avais une envie très forte de beaucoup naviguer et que j'avais identifié les études de lettres comme celles que je réussirais le plus facilement, et avec le plus de plaisir. Car tout le monde sent bien qu'il est difficile de se taper des études en littérature, sans un goût certain pour la matière

Les bancs de mes amphithéâtres sont remplis de filles et, bien que les STAPS partagent nos bâtiments, pas une seule n'est sportive, de près ou de loin, à part une danseuse et une adepte du stretching. Le règlement de ma section est un peu à leur image J'ai eu de la chance car celui de l'université a gardé une petite ligne pour les sportifs de haut niveau, et à force d'attestations, de dérogations, de courriers et de temps perdu, j'ai réussi à obtenir "le statut sportif de haut-niveau" qui équivaut à celui du salarié : la sacro-sainte dispense d'assiduité aux travaux dirigés (qui sont obligatoires, et largement majoritaires en lettres) et du contrôle continu. Je dois me présenter aux sessions d'examens finales et, si j'échoue ou n'y vais pas parce je suis en régate, j'ai comme dernière chance ­ comme tout le monde ­ la session de septembre. Ni plus ni moins. Si ce n'est que mes professeurs ne sont pas préparés à ce type d' excuses

Pour ce qui est des études de lettres-même (pour ceux que ça intéresse), il ne faut pas se laisser influencer par un volume horaire hebdomadaire, relativement faible, car le travail personnel à fournir est, à mon sens, l'un des plus lourds.

Pour ce qui est du statut sportif de haut-niveau, pour toutes les facs, il faut savoir qu'il n'existe aucune loi. Le Ministère de la Jeunesse et des Sports a simplement exprimé ses souhaits. C'est pourquoi, certains établissements refusent tout avantage aux sportifs, et d'autres sont dits conventionnés. L'équivalent d'un statut salarié, décrit ci-dessus, est alors le plus souvent proposé. Néanmoins, il faut en faire la demande et le justifier ; une commission décidera de l'accorder ou non.

De mon expérience, je retiens qu'il ne faut pas hésiter à se défendre, en fonction du règlement de son université, d'autant que les personnes n'y sont finalement, souvent, que peu familiarisées. Le sportif de haut-niveau reste un statut social très neuf ; il faut s'en souvenir et ne pas hésiter à l'expliquer, comme le disait Marion, à ses professeurs. C'est eux qui vous défendrons le mieux, à la condition qu'ils vous connaissent et vous reconnaissent !

Enfin, quel que soit le cursus, je suis persuadée qu'au plus on sera absent des cours, même si on peut récupérer les notes prises par un camarade, au plus la difficulté augmentera !"


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