Départ au lièvre, Comment les réussir ?

J'ai suivi ces échanges sur le web 505 sur la meilleure tactique à employer pour prendre un départ au lièvre et j'ai pensé qu'il valait la peine de les traduire car Barney tient un raisonnement à connaître… pour ne pas se faire piéger.

Traduit de l’anglais par Jean-Baptiste Dupont

He! les mecs,

Puisque le départ au lièvre sera utilisé aux prochaines régates  Midwinters 98, pourriez vous me donner quelques conseils sur la tactique et la stratégie dans ce type de départ ?

Je n'ai encore jamais pris de tels départs.

D'avance, Merci.

Mike Goldstein (Michael H. Goldstein, Dept. of Psychology Indiana University)

 

Mike :

Voici quelques trucs qui viennent de l'équipe de SPOT.

  1. Il est capital de naviguer au près serré quand on passe le bateau suiveur. Ne lofe pas en contournant le bateau suiveur comme si c'était une marque de parcours - Mieux, mets-toi au près pas trop serré et prépare-toi à remonter au près serré. Tu ne dois pas être en train de manœuvrer avec un grand coup de barre, une écoute à border et l'équipier en train de monter au trapèze pendant les 5 à 10 secondes qui précèdent le départ. Prépare-toi à franchir la ligne de façon que ton étrave passe à 5 cm environ sous le vent du bateau suiveur en rasant son coin arrière, son moteur ou toute autre partie qui dépasse à l'arrière. N’oublie pas de sourire pour la photo qui sera prise ou le film qui est tourné. Tandis que tu franchis la ligne, remonte un peu trop pendant quelques secondes pour créer de l'espace entre toi et les bateaux sous le vent et pour gêner les bateaux au vent en les squeezant. Cela demande un peu de pratique. Surtout ne touche pas le bateau suiveur, ce qui te vaudrait une disqualification immédiate.
  2. Comment surgir ? Du vent établi, force 4, au vent fort, force 6 ou plus, le 5o5 va aller à une vitesse qui est instable pour le bateau suiveur car c'est trop lent pour qu'il plane franchement. Le pilote du bateau suiveur doit continuellement jouer de l'accélérateur pour maintenir sa position derrière le lièvre. De ce fait, le bateau suiveur aura une course saccadée par rapport au lièvre. En observant ce phénomène, tu peux viser un peu plus haut et gagner quelques mètres supplémentaires au vent en passant le bateau suiveur juste après une accélération. Mais aussi fais très attention à ne pas te trouver dans la situation exactement inverse et de devoir plonger sous le vent à la dernière minute car le bateau suiveur est en train de ralentir !
  3. Comment éviter de se regrouper ? Pour une raison que je ne comprends pas très bien, les bateaux ont tendance à s'amasser en paquet au moment du départ en laissant de grands espaces d'environ 10 à 15 secondes pendant lesquels aucun bateau ne franchit la ligne derrière le lièvre, suivis de paquets compacts parmi lesquels il y aura forcément des gagnants et des perdants. Observe les bateaux et la façon dont ils se placent et ne t'engage pas sur une position vis à vis de la ligne avant les dernières 30 ou 40 secondes. Tu ne dois pas te trouver avec des bateaux au vent qui abattent et nulle part où aller que devant où alors rentrer dans le bateau suiveur. Toucher le bateau suiveur vaut une disqualification garantie. Dans ce cas, tu es dans l'obligation de les laisser passer pour éviter qu'ils ne percutent ton bateau. Bien sûr, ils devront faire un 720 pour la faute, mais ton départ est raté en attendant. C'est beaucoup plus sûr et efficace de te placer dans un espace vide et de franchir la ligne dans un espace isolé. Regarde le site Web du World 98, dans sa séquence introductive et tu remarqueras que TEAM SPOT, avec beaucoup de bon cœur, se "fait piéger" par un bateau qui abat - on est des mecs tellement bien !
  4. Il y a trois raisons pour lesquelles je préfère être le premier bateau à franchir la ligne dans ce genre de départ : La première c'est parce que je crois que nous sommes très rapides en remontant au vent (c'est une illusion que j'ai…) et je veux naviguer à ma vitesse plutôt qu'à celle du lièvre (nota si le lièvre est lent, passer en fin de ligne te fait endosser ce retard puisqu'il faut attendre son passage) et si nous ne sommes pas les plus rapides (ce qui est le cas le plus souvent), nous pouvons abattre dans de l'air non perturbé sans risquer d'être gêné par des bateaux sous le vent. Deuxièmement, il y a généralement très peu de bateaux à l'extrémité sous le vent, si bien que nous pouvons concentrer toutes nos faibles facultés intellectuelles sur le passage au cul du bateau suiveur, et troisièmement, cela réconforte de savoir que l'on a tiré le meilleur parti ou au moins que l'on est à égalité sur le premier bord qui suit le départ. Si le vent refuse, nous virons et nous allons passer devant la flotte, s'il adonne la flotte qui navigue sous le vent du lièvre en attendant de partir est coincée par le lièvre et nous sommes en tête et super placé pour le prochain bord.

Je trouve que faire le lièvre est une expérience épouvantable. Après une vie toute entière passée à me préparer mentalement pour éviter les bateaux tribord qui surgissent sous le vent, de devoir naviguer avec pendant ce bord un MUR de bateaux tribord qui crient et hurlent et qui sont tous parfaitement alignés pour t'embrocher ! D'accord, il y a le bateau suiveur et des pénalités draconiennes pour ceux qui ratent le départ - mais cela me fout la trouille. Essaye de te persuader qu'ils sont tous en petite culotte si cela t'arrive.

A bientôt en Floride.

Barney Harris, 505 USA 8643, Albacore USA 8011, TEAM SPOT

Barney a raison en ce sens qu'il vaut mieux éviter de manœuvrer en passant la ligne - un bateau qui change de cap est un bateau qui ralentit.

Cependant la difficulté est de profiter de la vitesse que l'on a obtenue en naviguant un peu abattu juste avant de passer la ligne. C'est pourquoi l'on doit faire très délicatement un lof juste avant de couper la ligne, ce que l'on cherche à faire, c'est à perdre moins de vitesse dans ce lof qu'on en a gagnée en abattant juste avant (en naviguant au petit largue plutôt qu'au près serré).

C'est difficile à bien faire et il faut s'y entraîner ; mais si cela vous propulse de seulement un quart de longueur plus avant au près; cet avantage est déterminant, réellement déterminant.

Si vous passez la ligne à toute vitesse, et juste derrière le bateau suiveur, vous naviguerez vite dans de l'air non perturbé et vous pourrez choisir votre route au près tout comme dans un départ en ligne. Vous n'avez pas à vous soucier d'être couvert au vent car personne ne peut s'y glisser pour vous gêner. Vous devez seulement vous occuper des bateaux sous le vent qui font un cap plus serré que vous. En somme si vous avez de l'espace sous le vent et personne au vent, vous pouvez naviguer vite.

Maintenant est ce que vous saurez tirer parti de cet avantage, c'est une autre histoire…

 Willy Hartje

 

De Barney en réponse à Will :

 

Will, tes remarques sur la façon de protéger son côté sous le vent sont excellentes, cependant je diverge sur un point -

Le message de Will Hartje disait qu' il y a un net avantage à abattre un peu avant que de franchir la ligne pour gagner de la vitesse -

La technique que je trouve plus efficace est de viser, au près serré, le centre du bateau suiveur du lièvre. Cela décourage ceux qui voudraient plonger sous votre bateau pour vous lofer car ils voient clairement qu'il n'y a pas de passage. Au moment où vous êtes presque sur le bateau suiveur, vous abattez et choquez les écoutes puis contournez doucement le bateau suiveur à son coin arrière. SPOT dit que c'est la transition de dernière seconde qui devrait être évitée. Je pense que le bateau ne devrait avoir aucune composante de vitesse dans une direction opposée à celle du bateau suiveur lorsque l'on se trouve à une longueur environ ; c'est à dire que le bateau qui coupe la ligne devrait naviguer à angle droit du bateau suiveur pendant quelques secondes et le passer sans altérer sa course sauf peut-être pour lofer un peu juste après le passage du lièvre. Abattre juste avant pour passer le bateau suiveur donnera un peu plus de vitesse, mais au prix de vous placer quelques mètres en-dessous de la position la plus au vent.

Barney a écrit :

  1. Il est très important de naviguer au près serré quand on passe le bateau suiveur. Ne lofer pas en contournant le bateau suiveur comme pour une marque sous le vent. Vous ne devez pas vous trouver à manœuvrer avec un grand coup de barre en bordant les écoutes et en montant au trapèze dans les 5 à 10 dernières secondes qui précèdent le franchissement de la ligne au cul du bateau suiveur. Réglez votre passage de façon à ce que votre étrave passe à quelques centimètres derrière le bateau suiveur sous sa partie sous le vent quelqu'elle soit - coin, moteur ou toute autre partie qui dépasse… souriez pour la photo. Tandis que vous franchissez la ligne, pointez un peu plus pendant quelques secondes pour créer de l'espace avec les bateaux sous le vent et pour coincer les bateaux au vent. Cela demande un peu de pratique. Ne touchez pas le bateau suiveur - ce qui serait vaudrait une disqualification automatique !!!

Vous devriez faire attention à protéger votre côté sous le vent. En fait, dans la mesure du possible, vous devez faire en sorte de maintenir deux longueurs au moins entre vous et le bateau sous le vent. Cela vous permet d'abattre si cela est nécessaire pour accélérer de façon à vous mettre dans du vent clair si quelqu'un a pris un meilleur départ que vous au vent. Cela vous protège aussi d'être coincé par un bateau qui remonte mieux à la sortie du départ.

 

Si vous arrivez à contrôler le bateau au vent en remontant mieux et en étant devant (il est alors coincé) ; cela peut avoir un effet très important car vous avez alors toute la flotte derrière vous et sous votre vent donc dans du vent pas clair.

La protection de son côté sous le vent demande une grande discipline, car on a toujours tendance à plonger dans l'espace que l'on s'est créé et à partir plus tôt, mais il faut résister à cette tentation.

De plus, ne stationnez pas sur la ligne de départ, partez de plus loin et arrivez lancé, cela demande une bonne appréciation et de la pratique pour le faire bien, mais on y arrive.

Ceux qui restent collés à la ligne avec les voiles fasseyantes, se font déposer par ceux qui arrivent lancés et qui plongent dans les espaces qu'ils avaient constitués pour se protéger.

Cela étant dit, il y a un certain intérêt à abattre un peu. La technique que je trouve plus efficace est de viser, au près serré, le centre du bateau suiveur du lièvre. Cela décourage ceux qui voudraient plonger sous votre bateau pour vous lofer car ils voient clairement qu'il n'y a pas de place pour passer. Au moment où vous êtes presque sur le bateau suiveur, vous abattez et choquez les écoutes puis contournez doucement le bateau suiveur à son coin arrière. Vous devriez être si près que votre équipier doit faire attention pour ne pas se heurter au bateau. Si vous le faites correctement, vous allez surgir de la ligne avec un peu plus de vitesse dans de l'air clair et vous obtiendrez un avantage considérable.

La différence entre un bon et un mauvais départ au lièvre peut résider dans seulement les quelques dizaines de centimètres, si vous êtes un tant soit peu devant, vous naviguerez au-dessus de la flotte ou les contrôlerez de façon à ce qu'ils n'aient pas de recours, si au contraire vous êtes un tant soit peu derrière, vous serez la victime et vous allez vous faire passer par les autres bateaux un par un jusqu'à la fin de la flotte.

Bonne chance !